LA PLAYLIST :
Le chaînon manquant entre la G-Funk de DJ Quik et la Country Rap Tunes de Pimp C. Là, au milieu de productions étherées, Ronald LaTour gravite sans que ses pieds ne touchent le sol. Cardo, enfant du Minnesota devenu citoyen texan, fournit dans les années 2010 un son souvent orienté vers la course du Soleil. Cardo Got Wings et vole aux quatre coins des States chez des spécialistes d’un rap chaud et laidback. Premièrement à Pittsburgh chez Wiz Khalifa sur son fameux « Kush & OJ » en 2010. On le retrouve en Californie chez Dom Kennedy en 2011 (II, From the Westside, with love), chez Polyester The Saint en 2013 (POP) , et même chez Snoop Dogg à plusieurs reprises (The Broadus Boyz en 2013, Kush en 2014 ou Coolaid en 2016)comme pour couronner ce g-funk 2.0. Comme le dit Polyester sur “Until The Sun Rize” : Cardo roule coast to coast, city to city. Nouvelle-Orléans avec Curren$y pour un inévitable morceau laid-back sur « Showroom », Houston avec Le$ et Slim Thug, et Massilon, Ohio avec Stalley sur un superbe « Spaceships and woodgrains » co-produit avec DJ Quik. Un DJ Quik qu’il viendra chatouiller avec une collaboration hors-californie et pourtant plus chaude qu’une ride sous les palmiers angelinos. Avec Payroll Giovanni, rappeur du grand froid de Detroit, il livre en 2016 un « Big Bossin Vol.1 » mixtape digne d’un album westcoast avec notamment un « Day in the Life » samplant Sade et un « Top Down Money Up » taillé pour une ronde nocturne. Mais la palette de Cardo ne s’arrête pas là. Le texan a plus d’un tour dans son sac et sait aussi servir un son plus sombre, en embrassant les froides rythmiques de la trap atlantienne en vogue à l’aube de la décennie 10. A Gary, dans l’Indiana, Freddie Gibbs lui fera confiance plusieurs fois pour ce mélange de chaud-froid notamment sur « F.AM.E. » (de son album « ESGN ») en 2013. D’un autre horizon plus à l’ouest, Nef, rappeur de Vallejo signé sur le label d’E-40, collabore avec lui en 2016 sur un projet collaboratif intitulé « Neffy Got Wings ». La même année, il signera « How does it feel » chez Kamaiyah, rappeuse d’Oakland, puis quelques tubes chez TDE. Ayant déjà frappé très fort en 2015 avec le possee-cut « Vice City » du Black Hippy réunissant Jay Rock, Kendrick Lamar, Ab-Soul et Schoolboy Q, il réitèrera en co-production avec Yung Exclusive sur deux « untitled unmastered » de Kendrick mais surtout sur un « That Part » diabolique sur le quatrième album de l’Ecolier Quincy avec un Kanye West en roue libre. Autre banger sombre qui claque comme un morceau boom-bap ynthétique nouvelle génération, « Troopers » de Jay Rock sur son parfait « Redemption » en 2018 montre encore le talent de Cardo pour fabriquer des mélodies brise-nuque redoutables. Dernière note remarquable au tableau du producteur texan ; ce « Seen It All » de 2014 de Young Jeezy featuring Jay-Z. Une flûte en symbole d’élévation au milieu de deux couplets musclés d’un roi du Sud et du roi de l’Est. La motivation music à son meilleur témoignant aussi de l’ascension phénoménale d’un producteur ayant marqué la décennie précédente par un son classieux, énergique, jouant avec les températures et les lumières comme très peu de ses congénères ont su le faire avant lui. Le haut du panier. Cette playlist n'est pas aussi exhaustive que celle livrée par les crocos de swampdiggers il y a quelques mois, et le papier ici-présent n'est pas aussi détaillée que la présentation faite par Raphaël Da Cruz dans La Sauce il y a quelques années, elle enfoncera juste encore un peu plus le clou pour mettre Cardo en haut des listes des top-producteurs les plus talentueux de cette musique.
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